Assise sur un rocher, je contemple le soleil couchant qui allume la nuit. Déjà quelques étoiles piquent un azur plus vraiment clair et invitent à un voyage n’ayant rien d’imaginaire.
A mes pieds, les embruns s’échouent sur mes sens pourtant je sens la fragrance de la mer. Le vent, porteur de senteurs lointaines, joue dans les herbes sèches accrochées dans le sable, frêle chevelure retenant la vie dans des entrelacs sans fin. J’inspire doucement. Je tente de saisir ces parfums, de les retenir un instant, mais ils s’échappent sans cesse.
A la chaleur diurne succède une fraîcheur océane dont la douceur me parle d’un lieu où tu es. Le cri d’une mouette répond au hululement d’une chouette dans cet ailleurs où le bleu du ciel est déjà plus profond. Celle-ci se pose avec le jour, celle-là s’envole sur les ailes de la nuit. L’obscurité grandit. Sur l’horizon, une ligne opaline empêche encore le ciel de sombrer dans la mer, ciel étoilé de milliers de serments prononcés par des milliers d’amants et dont chaque astre est comme une fleur de cerisier chargée de promesses d’un lendemain fruité dont on ignore encore le goût. Ainsi en est-il de ceux qui sont passés et sont devenus des hiers. Leur saveur ramène dans le cœur un sentiment sucré.
Je me souviens d’une plage, un après-midi de septembre. Le sable buvait nos pas, ne gardant nulles traces de notre passage. Pourtant le temps a conservé cet instant quelque part dans une mémoire embaumant chaque soir et chaque matin de la vie. Je me souviens de cette chaude après-midi. Un vent léger ridait la surface si tranquille de l’eau, qu’on aurait pu se croire au bord d’un lac sans la ligne d’horizon sur laquelle la voûte céleste s’abîmait dans l’océan. Tu m’avais prise dans tes bras et les mouettes au-dessus s’étaient moquées de nous.
Au loin, le phare s’est allumé, de même que les réverbères de la ville à l’autre bout de l’anse. Mes pensées s’échappent et s’envolent vers un lointain pays. Je me suis éloignée de toi et pourtant en mon cœur tu demeures. La lune paraît, semant la lumière sur l’encre de l’eau, elle brode d’écume la surface dansante venue clapoter sur mes pieds, presque avec tendresse.
J’inspire à pleins poumons le noir du firmament, le sel et les embruns, l’humidité du sable et cette paix qui se répand.
Sur l’horizon, le ciel a épousé la mer.