Pour peindre un oiseau - J. Prévert
Peindre d’abord une cage
Avec une porte ouverte
Peindre ensuite
Quelque chose de joli
Quelque chose de simple
Quelque chose de beau
Quelque chose d’utile
Pour l’oiseau
Placer ensuite la toile contre un arbre
Dans un jardin
Dans un bois
Ou dans une forêt
Se cacher derrière l’arbre
Sans rien dire
Sans bouger…
Parfois l’oiseau arrive vite
Mais il pourrait aussi mettre de longues années
Avant de se décider
Ne pas se décourager
Attendre
Attendre s’il le faut pendant des années
La vitesse ou la lenteur de l’arrivée de l’oiseau
N’ayant aucun rapport
Avec la réussite du tableau
Quand l’oiseau arrive
S’il arrive
Observer le plus profond silence
Attendre que l’oiseau entre dans la cage
Et quand il est entré
Fermer doucement la porte avec un pinceau
Puis effacer un à un tous les barreaux
En ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l’oiseau
Faire ensuite le portrait de l’arbre
En choisissant la plus belle de ses branches
Pour l’oiseau
Peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
La poussière du soleil
Et les bruits des bêtes de l’herbe dans la chaleur de l’été
Et puis attendre que l’oiseau se décide à chanter
Si l’oiseau ne chante pas
C’est mauvais signe
Signe que le tableau est mauvais
Mais s’il chante c’est bon signe
Signe que vous pouvez signer
Alors vous arrachez tout doucement
Une des plumes de l’oiseau
Et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau.
Simplement le ressac et puis l’écume
Peut-être un grain de silice glissé entre les orteils
La délicatesse du sable si fin et si soyeux
Le vent tombé, le macareux arrêté en plein ciel
Un phare perché dans le lointain, jusqu’à l’infini de la grève
Inutile, dressé face à l’océan, planté sur la rocaille
Le mouvement lent de l’horizon glissant sur l’eau
Un bleu si bleu qu’il ne sert à rien de le décrire
Il remplit le décor, il avale tout sur son passage
Puis l’écoulement de la fraicheur autour de la cheville
Comme une pluie couchée sur le dos qui déferle sous la peau
Arasement de l’air qui remplit d’éclats salins
Les paupières qui se referment
Mais ce voilier, si lointain, si blanc
Dérivant entre les brisants
Qu’emporte-t-il à son bord ?
Peut-être ton âme vagabonde
Ton visage et ton sourire
Ta délicatesse et l'amour et la vie
Tout ce qui vide ce tableau ridicule
Qui se peint péniblement
Sur ce bout de papier inutile
Qu’au moins il s’envole
Pour rendre à l’aile
Son envergure
Et sa beauté
„Leben in der Liebe zum Handeln und Lebenlassen
„Leben in der Liebe zum Handeln und Lebenlassen im Verständnis des fremden Wollens ist die Grundmaxime des freien Menschen.“
"Vivre dans l'amour de laisser vivre et faire en comprenant la volonté de l'autre est le principe même de l'Homme libre."
Rudolf Steiner
Un bouton de rose
Juste un bouton de rose.
Né ce jour d'avant, il s'ouvre.
Tout doucement.
D'un souffle caressant,
ce jour d'hui l'entrouvre.
Délicatement.
Juste un peu de ciel
déversé au matin,
me déverse et s'éploie
sur un pétale virginal.
Soie incarnadine,
il déshabille le cœur.
Juste un peu de pluie
sur l'ajour d'une rose,
éveille la mie endormie.
Sur une goutte d'eau,
un baiser déposé par le jour
perle jusqu'à l'intime secret.
Corazón libre
Ils t'ont assiégé Cœur
et attendent ton renoncement,
les uniques vaincus, Cœur
ce sont ceux qui ne luttent pas.
Ne te rends pas Cœur libre,
ne te rends pas
Ne leur permet pas Cœur
de tuer la joie,
rapièce d’un rêve Cœur,
tes ailes mutilées
Ne te rends pas Coeur libre,
ne te rends pas
Et souviens-toi Cœur,
l'enfance sans frontières,
le toucher de la vie Cœur,
une chair de printemps,
Ne te rends pas Coeur libre,
ne te rends pas
Ils se fourvoient Cœur,
avec des chaînes fragiles,
plus de vent que des racines, Cœur,
brise les et envole toi.
Ne te rends pas Coeur libre,
ne te rends pas
Ne les écoute pas Cœur,
que ses voix ne t’assourdissent pas,
tu seras complice et esclave Cœur,
si c’est ce que tu écoutes
Ne te rends pas Coeur libre,
ne te rends pas
En avant Cœur,
sans la peur de la défaite.
Durer, ce n'est pas être vivant Cœur
vivre c’est une autre chose
Brouillard au levantLes arbres sont effacésIls
Brouillard au levant
Les arbres sont effacés
Ils sont d'or au soir
Dans le silence les pas mènent les pensées vers Toi.
Le brouillard au levanta dérobé la collineLe ciel
Le brouillard au levant
a dérobé la colline
Le ciel est bleu
Sur les toiles emperlées des clins de lumière argent
La citadelle de silence - Pierre Bordage
Capturez la citadelle de silence,
En elle, nul n’attaque,
Nul ne peut vaincre l’infini,
Source de toute chose.
Capturez la citadelle de silence,
Où toute maladie trouve guérison,
Où toute guerre trouve paix,
Où toute mort reprend vie.
Capturez la citadelle de silence,
L’amour sera votre bouclier,
La lumière sera votre pain,
Le son votre gardien.
Capturez la citadelle de silence,
Elle est la demeure de Dieu.
Source : Souffle de songe
La pluie sur l'étang dessine des ronds dans
La pluie sur l'étang
dessine des ronds dans l'eau
bruissement de feuilles
Impassibles les foulques sont regroupées pour la nuit.