Esprits rebelles
Nous ne sommes plus une terre de paix,
nous ne sommes plus une terre d'accueil.
Qu'avons-nous fait de notre cœur ?
C'était il y a longtemps, la mémoire s'en souvient.
La terre était fertile, c'était une terre d'asile
où dans les chants se propageaient les liens.
Caïn avait tué Abel, oui je me le rappelle.
Mais depuis les grandes eaux,
de Victor Hugo à Lorca, en passant par Celan,
Khalil Gibran et Ben Jelloun,
les cœurs rebelles ont fructifié.
Que sommes-nous devenus ?
Nous ne sommes plus une terre de paix,
nous ne sommes plus une terre d'accueil.
Il y eut pourtant tant de semeurs.
En ce temps là les cœurs étaient féconds
ensemencés par Saint Exupéry, Apollinaire et Giono,
et nous pensions les guerres bien loin
car nous savions, à l'autre, tendre la main.
Les portes étaient ouvertes et les batteuses en juillet
fêtaient le grain dans les grenier garnis.
Nous partagions le pain et n'étions pas avares de joie.
Que s'est-il passé aujourd'hui ?
Nous ne sommes plus une terre de paix,
nous ne sommes plus une terre d'accueil.
Les épines ont poussé, si noires malgré leurs fleurs.
Nos cœurs sont des ronciers portant des mûres si sures.
Nous ne sommes plus une terre fertile,
nous en avons banni Camus
et nos âmes sont débiles, Dostoïevsky est loin.
Le cœur s'étiole en jardin clos, mais tout comme le roseau,
si on lui donne un nay, il chante.
De proche en proche, sa voix s'entend,
de proche en proche, elle enfle et se répand.
Qu'avons-nous fait de notre souffle,
que faisons-nous de notre voix ?
Nous ne sommes plus une terre de paix,
nous ne sommes plus une terre d'accueil.
Qu'avons-nous fait de notre terre,
que faisons-nous de notre cœur ?
Nous ne sommes plus une terre de paix,
nous ne sommes plus une terre d'accueil.
Réveillez-vous, esprits rebelles !
Les moutons sont sans cœur et les loups n'ont pas d'âme.
Réveillez-vous, semez demain.
Donne moi le nay et chante.
l'utopie est un rêve ensemencée de liens
et la terre est fertile qui est une terre de paix
et la terre est féconde qui est une terre d'accueil.